HELLEPUTTE, Joris.

Né à Gand, le 31 août 1852, décédé à Louvain, le 22 février 1925.

 

Ministre d'État.

Ministre de l'Agriculture, 1907-1908, 1910-1911, 1912-1918.

Ministre des Travaux Publics, 1910-1911, 1918.

Ministre des Chemins de Fer, Postes et Télégraphes, 1907-1910.

Membre de la Chambre des Représentants.

Membre de l'Académie Royale Flamande.

 

Grand Croix de l'Ordre de la Couronne, Grand Officier de l'Ordre de Léopold, Croix Civique de 1re Classe, Croix Spéciale des Mutualistes, Médaille Commémorative du Règne de Léopold II.

Grand Croix de l'Ordre du Mérite Civil de Bulgarie, de l'Ordre du Sauveur de Grèce et de l'Ordre du Lion et du Soleil de Perse, Grand Officier de l'Ordre de la Légion d'Honneur de France et de l'Ordre Pontificial du Pie, Commandeur de l'Ordre des SS. Maurice et Lazare d'Italie et de l'Ordre de la Villa Vicosa de Portugal, Officier de l'Ordre de la Rose du Brésil, Croix Pro Ecclesia et Pontifice.

 

 

HELLEPUTTE, Georgius-Augustinus, ingénieur des ponts et chaussées, professeur à l’Université Catholique de Louvain, Ministre d’Etat, né à Gand le 31 août 1852, décédé à Louvain le 22 février 1925.

Cadet de cinq enfants, Georges Helleputte était issu d’une famille de modestes artisans ; son père et son grand-père exerçaient le métier de boulanger. Une éducation solide, secondée par un tempérament sérieux, actif et volontaire, lui permit d’aborder les études moyennes à l’Athénée Royal de Gand. En 1868, il sort premier de sa promotion et entre aux Ecoles Spéciales de la même ville pour y conquérir, au terme de trois ans, le grade d’ingénieur des ponts et chaussées. Il a alors dix-neuf ans et entreprend en 1871 un voyage d’étude à l’Exposition Internationale de Vienne ; bientôt après, il est engagé comme ingénieur par la direction des chemins de fer belges.

Mais Louis Cousin, professeur à la faculté des sciences de l’Université de Louvain, a repéré les qualités du jeune ingénieur. Sur sa proposition Helleputte résilie son contrat et entame en 1876 une longue carrière professorale au service de l’Université Catholique. Il y enseignera successivement l’architecture civile, industrielle et religieuse, l’histoire de l’architecture et après le départ de Cousin au Chile en 1889, il prendra sa succession aux constructions du génie civil. Il poursuivra cet enseignement jusqu’à son entrée au gouvernement en 1907.

Par ailleurs dès 1876, Helleputte est inscrit comme membre de la confrérie Saint-Michel, association catholique ultramontaine, fondée l’année précédente par Charles Périn, juriste et professeur à Louvain. Helleputte y coudoie les milieux dirigeants de la presse catholique, spécialement ceux du Courrier de Bruxelles et du Bien Public de Gand. Au contact de ces hommes rompus aux manœuvres de la vie politique et sociale, il s’initie aux méthodes d’approche de l’opinion publique, qui assureront au parti catholique la victoire électorale de 1884.

En 1878, Helleputte tente à Louvain une expérience corporative qui constituera le point de départ de son programme en matière de réforme sociale. Il se voit confier par l’Université Catholique l’adjudication des travaux du nouveau Collège Juste-Lipse. Helleputte s’adresse directement à un certain nombre de maîtres-artisans qui soumissionnent chacun pour la patrie de l’œuvre qui le concerne. Le travail est exécuté avec entrain, chaque chef de métier mettant au service de l’œuvre commune ses ouvriers les plus qualifiés. Fin de l’été 1879, ses collège est achevé à la grande satisfaction de tous. Cette expérience d’une collaboration efficace entre tous les secteurs de la construction ranima chez Helleputte et ses associés le rêve des vieilles corporations d’autrefois, fondées sur la communauté d’intérêt et de travail. L’idée fut adoptée avec enthousiasme par les dix-sept participants, qui bientôt se retrouvèrent œuvrant de conserve dans divers coins de Belgique. Ils vulgarisaient ainsi, sans le revoir, ce style néo-gothique cher à Helleputte, dont nous retrouvons la marque aujourd’hui encore, dans bon nombre de constructions de l’époque (Collège Américain, Collège Saint-Pierre, Séminaire Léon XIII, Institut Saint-Thomas, église des P.P. Conventuels). La gilde des métiers et négoces de Louvain venait de naître et ferait bientôt école dans de nombreux centres urbains du pays. Autour du noyau professionnel, se greffera rapidement un réseau d’œuvres sociales (Banque populaire, Ecole professionnelle Saint-Pierre, Bourse du Travail, Société pour la construction de maisons ouvrières) qui assureront à l’œuvre un rayonnement durable. Helleputte mettra à profit les trois congrès des œuvres sociales à Liège (1886, 1887 et 1890) pour présenter cette expérience devant l’opinion publique et tenter d’en dégager un programme général, valable pour tous les secteurs de l’industrie. Entre temps, il s’est fixé à Louvain où il a épousé en 1882 Louise Schollaert, fille de l’ancien premier ministre Frans Schollaert père, décédé en 1879.

La mise en place d’une institution comme la gilde des métiers de Louvain n’était qu’une étape dans la réalisation d’une réforme plus profonde. Par delà cette réalisation locale, Helleputte visait à l’instauration en Belgique d’un système corporatif, englobant toutes les classes d’intérêt, les organisant sur le plan économique et social, pour leur donner enfin une représentation politique au sein du Parlement. Ce programme avait été fixé dans ses grandes lignes par les sociaux-chrétiens, lors de la seconde assemblée qu’ils tinrent à Fribourg en 1886 et à laquelle avait participé Helleputte.

Un heureux concours de circonstances lui permit de passer rapidement aux applications pratiques. En 1890, il rencontre l’abbé Mellaerts, curé de Sint-Alfons-Goor, également soucieux de grouper les travailleurs agricoles en associations corporatives. De cette rencontre devait surgir le Belgische Boerenbond (Ligue Belge des Agriculteurs), qui fit rapidement tache d’huile dans les campagnes flamandes et structura efficacement les masses agricoles.

L’ensemble des œuvres ouvrières chrétiennes, parmi lesquelles plusieurs gildes de métiers déjà fondées, éprouvèrent bientôt le besoin de rajeunir l’ancienne fédération des œuvres ouvrières catholiques, alors mourante ; elles souhaitaient agir de façon déterminante sur les milieux populaires et sur la législation sociale. Un vœu fut émis dans ce sens en 1889 par la gilde de Saint-Nicolaes-Waes et fut à l’origine de l’érection de la ligue démocratique belge en mars 1891 ; la présidence de cette association fut aussitôt confiée à Helleputte. La ligue groupe alors quelque cent vingt-cinq associations de tous genres : mutuelles, caisses de pensions, cercles ouvriers, coopératives ; à cet ensemble hétéroclite, Helleputte s’efforcera de donner une structure corporative ; il se verra toutefois vite contré par les tenants des syndicats purement ouvriers et devra démissionner de la présidence de la ligue en 1895. La ligué démocratique poursuivra son essor sous la direction d’Arthur Verhaegen.

Ainsi en 1893, au moment précis où le peuple des villes et des campagnes entrait en masse dans le nouveau corps électoral par suite de l’instauration du suffrage universel plural, le parti catholique disposait, grâce à Helleputte, de cadres sommaires mais structurés, capables de diriger les forces nouvellement libérées.

Entre temps Helleputte était entré au Parlement, en août 1889, comme représentant de l’arrondissement de Maaseik. La précision de son argumentation, la vivacité de ses ripostes et firent très vite un orateur de premier plan et un adversaire redouté. Les problèmes de réforme électorale et sociale, la question scolaire et l’émancipation flamande constituèrent les principaux objectifs de ses interventions à la Chambre des Représentants. Très tôt Helleputte apparut comme un futur leader de la « jeune droite », aile progressiste du parti catholique. Toutefois ses prises de position contre la représentation proportionnelle en 1893 et son attachement obstiné à la formule corporative tranchaient trop sur le programme de la démocratie sociale pour lui permettre d’influer de façon décisive sur la conduite des démocrates. Longtemps Helleputte jouera le rôle de tampon entre les deux fractions de la droite catholique, s’appuyant tantôt sur l’une, tantôt sur l’autre, pour faire prévaloir ses points de vue politiques. Peu désireuses de perdre un partenaire de cette envergure, les deux parties fermèrent provisoirement les yeux devant une telle manifestation d’indépendance. En 1900, Helleputte sera réélu représentant de l’arrondissement de Tongres-Maaseik et conservera son mandat sans interruption jusqu’à sa mort.

Dès janvier 1899 son nom fut mis en avant lors de la constitution du cabinet Van de Peereboom. Au dernier moment cependant il fut éclipsé par Cooreman et il faudra attendre mai 1907 pour trouver Helleputte au département des chemins de fer, postes et télégraphes. Il assumera la direction de ce département jusqu’en 1910 ; après les élections de juin 1910, il prendra le portefeuille de l’agriculture et des travaux publics et le conserva jusqu’en septembre 1918, sauf une interruption d’un an en 1911-1912.

L’invasion de la Belgique par l’Allemagne en août 1914 conduisit Helleputte au Havre, où il se fixa à Sainte-Adresse pour la durée des hostilités. Cette période d’exil fut marquée par de regrettables intrigues. Le contact quotidien des soldats flamands et wallons, soumis à des cadres s’exprimant exclusivement en français, suscita des rancœurs. On commença à parler de diviser le pays. Helleputte, profondément attaché à la cause flamande, ne vit pas l’inopportunité de telles manœuvres et les encouragea du Havre. Eventée à temps, la crise put être conjurée mais l’affaire devait rebondir devant l’opinion publique en 1922. Au cours de son séjour au Havre, Helleputte fut également l’objet d’un grave accident de voiture, qui brisa quelque peu son dynamisme d’autrefois.

Rentré en Belgique au terme de la guerre, il reprit sa place à la Chambre , mais y joua un rôle plus effacé et conciliant. Ses dernières interventions relevaient davantage de problèmes techniques où d’ailleurs il excellait. On doit en grande partie à sa ténacité la décision des travaux de la jonction Nord-Midi sur laquelle il présenta un compte rendu circonstancié. Ce fut aux yeux des contemporains le couronnement de sa carrière d’ingénieur et parlementaire.

Helleputte mourut sans enfant le 22 février 1925 dans sa demeure de la place Saint-Antoine à Louvain. Il laissait derrière lui une collection de documents d’archives d’une extrême richesse, accessible aujourd’hui aux Archives Générales du Royaume de Belgique, à Bruxelles.

 

Roger Ernotte – Biographie Nationale.