
van der ELST, Baron
Léon, G.-J.-M.-P.
Né à Bruxelles, le 6
janvier 1856, y décédé, le 23 mai 1933.
Secrétaire-Général du
Ministère des Affaires Étrangères, 1905-1917.
Envoyé Extraordinaire et
Ministre Plénipotentiaire en Espagne, 1917-1918.
Conseiller Diplomatique du
Roi Albert I, 1906-1918.
Grand Officier de l'Ordre
de Léopold et de l'Ordre de la Couronne, Croix Civique de 1re Classe, Médaille
Commémorative du Règne de Léopold II, Médaille Commémorative du Centenaire.
Grand Croix de l'Ordre
d'Adolphe de Nassau de Luxembourg, de l'Ordre d'Isabelle la Catholique
d'Espagne, de l'Ordre du Trésor Sacré de Japon et de l'Ordre de
Saint-Stanislas de Russie, Grand Officier de l'Ordre des SS. Maurice et Lazare
d'Italie, de l'Ordre d'Orange-Nassau de Pays-Bas, de l'Ordre du Double Dragon de
Chine, de l'Ordre de la Légion d'Honneur de France et de l'Ordre de la Couronne
de Siam, Commandeur de l'Ordre du Soleil Levant de Japon et de l'Ordre du Christ
de Portugal, Officier de l'Ordre de Sainte-Anne de Russie.

van der ELST, Léon-Georges-Joseph-Marie-Philomène, Baron, haut
fonctionnaire, diplomate, né à Bruxelles le 6 janvier 1856, décédé à
Ixelles le 23 mai 1933.
Ses parent François van der Elst et Barbe Gouverneur de Roodenbeke
avaient cinq enfants : deux fils, Georges (1848-1919, auteur de la branche
aînée des Barons van der Elst) et Léon, ainsi que trois filles, Marie, Athinaïs
(entrée en religion chez les Dames du Sacré-Cœur) et Thérèse. Léon van der
Elst épousa le 3 mai 1892 à Rijsenburg (Pays-Bas) Marie-Anne van Vessem
(1866-1960), fille du jonkheer Henri-Alexandre-Léopold (intendant du Palais
Royal d’Amsterdam) et de Françoise-Louise d’Arripe. Quatre enfants sont
issus de cette union : Henri, Emmanuel, Joseph et Marie, dite Massabielle.
Léon van der Elst obtint concession de noblesse (titre de chevalier) le
10 décembre 1894, et concession du titre de baron le 5 août 1910 ; le 15
novembre 1919, ce titre fut étendu à tous ses descendants. La devise des van
der Elst est Credo.
Léon van der Elst étudie à
la Faculté
Saint-Louis
à Bruxelles avant d’obtenir le diplôme de docteur en droit à l’Université
de Louvain (1876-1878). Il s’établit comme avocat près
la Cour
d’Appel de Bruxelles, après avoir effectué un stage chez maître Maurice
Despret mais quitte le barreau après quelques années pour entrer dans un
cabinet ministériel. Ce fut le début d’une brillante carrière.
Le jeune avocat fut notamment remarqué par le chevalier A. de Moreau,
ministre de l’agriculture, de l’industrie et des travaux publics, qui
l’attache à son cabinet le 30 octobre 1884. L’année suivante, il est chargé
du secrétariat du cabinet. Du 19 février 1889 au 24 mai 1895, il dirige le
cabinet du ministre de l’intérieur et de l’instruction publique. Lorsque J.
de Burlet échange le portefeuille de l’intérieur contre celui des affaires
étrangères (25 mai 1895), van der Elst le suit, toujours en sa qualité de
chef de cabinet, exerce cette fonction pendant dix ans et collabore étroitement
avec le Baron Paul de Favereau (ministre des affaires étrangères de 1896 à
1907). Parallèlement ç cette carrière dans les cabinets ministériels, il
grimpe les échelons de la hiérarchie administrative de l’état ; il est
nommé successivement chef de bureau (1886), chef de division (18 février
1889), directeur (30 décembre 1892) et directeur général (5 avril 1897). Le
20 mai 1905 il accède au grade de secrétaire général du ministère des
affaires étrangères, en remplacement du Baron Lambermont.
Ses activités furent des plus diversifiées. Il prépare le voyage en
Belgique du vice-roi de Chine, Li-Hung-Chang ; ce dernier visita entre
autres les usines Cockerill à Seraing (11-13 juillet 1896) et lui offrit son
portrait dédicacé à cette occasion. Il s’occupe d’un problème qui surgit
à propos du Saint-Siège, de la création de
la Cour
Permanente
d’Arbitrage de
La Haye
(1896) et est consulté à propos d’une offre de médiation dans le conflit
qui oppose
la Grande-Bretagne
au Transvaal (1902). Il devient secrétaire du conseil des ministres. Le 23 décembre
1908, il s’entretient avec l’administrateur colonial français Emile Gentil
concernant une médiation (éventuelle) de
la France
dans le différend anglo-belge relatif au Congo. Le 2 mai 1907, Favereau avait
cédé le portefeuille des affaires étrangères à Jules Davignon, homme
politique plus représentatif qu’efficace ; dès lors van der Elst dirige
de fait la politique extérieure belge. Il participe en sa qualité de délégué
belge aux négociations anglo-germano-belges relatives à la délimitation de la
frontière du Congo Belge ; un accord intervient le 11 août 1910 ;
l’île de Kwidjwi, située au centre du lac Kivu demeure territoire congolais ;
Guillaume II, empereur d’Allemagne, qui avait remarqué ses talents de négociateur,
s’entretient en aparté avec van der Elst lors de sa visite à Bruxelles en
1910. A
la suite de négociations secrètes entre sociétés allemandes et françaises,
le gouvernement de
la République
fait sonder officieusement le gouvernement belge par le biais de van der Elst
au sujet d’une cession à bail à
la France
d’une zone située au Congo belge sur la rive gauche du fleuve Oubanghi (22
novembre 1911). Léon van der Elst conseille le roi Albert dans l’affaire de
la saisie, en juin 1912 dans le port de Zeebrugge, d’armes à bord du navire
hollandais « Vos », armes destinées à un groupe de royalistes
portugais qui voulaient renverser le gouvernement de la république et prendre
le pouvoir à Lisbonne ; la gouvernement portugais, informé de leurs
projets, avait pris mesures ; l’affaire était autant plus délicate que
des membres de la famille de Bragance (apparentés à la duchesse de Bavière,
Marie-Josepha, mère de la reine Elisabeth) avaient trempé dans le complot
(1912-1913).
A maintes reprises, van der Elst rencontre des diplomates britanniques et
les informe sur le problème de la reprise du Congo par
la Belgique.
Il
suit de près le projet de construction d’un chenal navigable entre Kinshasa
et l’embouchure du fleuve Congo, initiative due à une société à capitaux
allemands, français et britanniques ; la question était importante et
pouvait avoir des conséquences fâcheuses, il fallait par conséquent éviter
qu’une artère de communications aussi importante ne tombe entre les mains de
puissances étrangères (1912-1913). Le secrétaire général manifeste le même
intérêt à l’égard d’un projet français qui vasait la construction
d’un chemin de fer reliant la côte atlantique à Brazzaville (Congo français)
et s’informe à ce sujet auprès de Merlin, gouverneur général ff. de
l’Afrique Equatoriale Française (vers 1914). Le 1er août 1914, à
la veille de la première guerre mondiale, il collabore à la rédaction de la
lettre personnelle du roi Albert à l’empereur Guillaume II, et ensuite à la
rédaction de la réponse du gouvernement belge à l’ultimatum allemand du 2
août.
Après l’invasion du pays par les troupes allemands, van der Elst suit
le gouvernement d’abord à Anvers, ensuite au Havre. Là, il a rapidement de
lourdes responsabilités à assumer face à la carence du ministre Jules
Davignon, atteint d’une congestion pendant le siège d’Anvers et dont la
santé déclinait. Jules Van den Heuvel, juriste réputé et ancien ministre non
parlementaire exerçait une sorte de tutelle sur le ministre et collaborait
chaque jour avec van der Elst. Sur les instances du roi, Davignon se retira, non
sans réticences (1915) et se fixa à Nice où il décéda le 12 mars 1916. Il
fut remplacé par un diplomate, le Baron Beyens, que van der Elst connaissait
depuis 1897. Beyens avait exercé de 1910 à 1912 les hautes fonctions de
ministre de
la Maison
du Roi. Mais son indépendance, certaines de ses réactions et surtout,
semble-t-il, la conception qu’il avait des devoirs du chef de l’état (opposée
à celle d’Albert) avaient créé rapidement un différend entre le souverain
et son conseiller (différend sont van der Elst fut d’ailleurs informé). Le
roi s’en était « débarrassé » en quelque sorte, en lui
proposant en 1912 le poste important de Berlin, où le Baron Greindl, très âgé
et considéré comme trop germanophile, ne suffisait plus à la tâche. Après
l’ultimatum allemand du 2 août 1914, Beyens avait tenu à Berlin un langage
fier et courageux, et était en disponibilité depuis son retour de la capitale
allemande. Le roi réussit à imposer au gouvernement son ancien collaborateur
pour remplacer ad interim Davignon (30 juillet 1915) et le nomma Ministre d’Etat
et membre du Conseil des Ministres. Beyens deviendra ministre des affaires étrangères
le 18 janvier 1916, au moment crucial où le gouvernement belge se vit obligé
de faire entendre sa voix sur le plan diplomatique et de préciser la position
particulière du pays à l’égard de tous les belligérants. Beyens, fils
d’un diplomate, n’était pas un homme politique. Catholique, il n’avait
pas d’attaches avec le parti. Intelligent et distingué, il savait se montrer
froid et distant (Ch. de Broqueville le qualifiait d’antipathique). Il se méfiait
des politiciens et ceux-ci lui rendaient bien la monnaie de sa pièce. Il
occupait donc une position un peu particulière dans le gouvernement du Havre et
ne se laissait pas « mener ». Il préconisait, en accord avec le roi
d’ailleurs, une politique modérée dans le domaine de la neutralité et également
à l’égard des projets d’extension territoriale que nourrissaient certains
de ses collègues. Il n’est donc pas étonnant que sa politique n’obtint pas
l’adhésion des membres du gouvernement. Au contraire, elle fut désapprouvée
par certains ministres. Et qui plus est, le Baron de Broqueville, chef du
gouvernement et ministre de la guerre, briguait le portefeuille des affaires étrangères.
Au Havre, centre d’innombrables intrigues, Beyens se trouva isolé et démissionna
en juillet 1917 ; lors du remaniement ministériel du 4 août 1917, il céda
son portefeuille à de Broqueville et disparut dès lors de la scène politique.
Le départ de Beyens eut une répercussion directe sur la carrière de van der
Elst. Au début, le ministre avait adopté à l’égard du secrétaire général
une attitude défiante, mais il finit par apprécier les talents et le dévouement
de son collaborateur. Sans être complètement d’accord avec lui, van der Elst
a soutenu la politique de Beyens. Dans les milieux politiques du Havre on le
considérait, à tort ou à raison, comme l’inspirateur de celle-ci. Quant à
de Broqueville, il voulait réorganiser le département des affaires étrangères,
qu’il considérait comme « enlisé dans l’ornière des traditions »,
y introduire des hommes nouveaux et mener une politique « plus dynamique ».
Pour lui, Pierre Orts, diplomate attaché au ministère des colonies, devait
remplacer van der Elst. Orts assumera de 1917 à 1919 les fonctions de secrétaire
général ad interim et deviendra ainsi le collaborateur d’abord de de
Broqueville, ensuite, après la démission de celui-ci, en décembre 1917, de
Paul Hymans. de Broqueville, habile manœuvrier et orateur talentueux, laissait
sous-entendre à van der Elst que son éloignement n’était que provisoire et
Orts, de son côté, affirmait ne vouloir exercer la fonction de secrétaire général
qu’ad interim. Mais après la guerre, H. Costermans accédera à cette
fonction. Léon van der Elst est bel et bien écarté de la politique, victime
de diverse intrigues. On lui propose un poste diplomatique « important »,
par un choix des plus flatteurs, de préférence à un diplomate. Il souhaite être
accrédité près le Saint-Siège, mais devant le peu d’empressement que
manifeste Van den Heuvel à quitter ce poste, il doit se contenter de la légation
de Madrid. Après avoir servi pendant trente-trois ans et avoir été, pendant
environ un quart de siècle, un des piliers du ministère des affaires étrangères,
il se trouve devant un choix pénible. Il avait alors soixante et un ans.
Il est nommé envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de 1e
classe le 1er septembre 1917. Alphonso XIII, roi d’Espagne,
accueille favorablement sa désignation. Si la carrière administrative de van
der Elst fut longue et fructueuse, son rôle dans la diplomatie passa inaperçu
et consista à mieux faire comprendre la situation particulière de
la Belgique
par les milieux politiques de l’Espagne, pays neutre où les empires centraux
jouissaient de nombreuses sympathies. Il s’intéresse aussi à la question de
la Palestine
, devenue d’actualité après la déclaration Balfour. Transplanté dans le
cadre traditionnel, « archaïque » de la haute aristocratie
espagnole, il a de nombreuses obligations mondaines, ce qui pose rapidement un
problème financier au diplomate belge. En réalité, il ne s’adapte pas à sa
nouvelle situation. Il se sent isolé, devient mélancolique et découragé ;
des ennuis de santé viennent aggraver cet état. Lorsqu’en automne 1918, la
guerre prend une tournure définitive en faveur des Alliées, il ne cache pas
son désir de rentrer à Bruxelles. Quels espoirs nourrit-il ? Retrouver
ses fonctions au ministère des affaires étrangères ? Etre nommé à une
fonction à
la Cour
? Costermans y fait allusion dans une lettre du 17 octobre 1918. Ou
simplement être auprès de ses trois fils qui, en août 1914, s’étaient
engagés comme volontaire dans l’armée et qui, à la fin de la guerre,
devaient choisir une profession ? Il est difficile de le préciser mais il
est probable que tous ces éléments ont joué. Il sollicite sa mise en
disponibilité, l’obtient le 18 septembre 1919 et quitte Madrid le 3 octobre ;
le 30 novembre le Baron de Borchgrave remplace. En 1921, van der Elst s’occupe
encore d’une intervention éventuelle du gouvernement belge en faveur du
Saint-Siège. Par AR du 20 décembre 1922, démission de ses fonctions est
accordée. Une longue carrière avait pris fin.
Durant son séjour à Madrid, van der Elst avait fait l’objet
d’attaques de certains milieux politiques. Il s’agit des documents « Barnardiston »,
appelés ainsi d’après le nom d’un ancien attaché militaire britannique,
dont la mention revient fréquemment dans ces papiers. Les Allemands les avaient
découverts en 1914 au ministère de la guerre et au ministère des affaires étrangères
à Bruxelles. En les faisant imprimer et paraître en 1915, ils voulaient démontrer
que, vers 1912 déjà,
la Belgique
n’observait plus une stricte neutralité. Cette publication causa un certain
mécontentement chez les Alliées et en 1915 déjà le nom de van der Elst avait
été cité au Havre, mais l’affaire n’eut pas de conséquences pour le secrétaire
général. Elle réapparut dans la presse durant la première moitié de 1919.
En mars de cette année, le diplomate demande qu’une commission d’enquête
soit créée, mais Paul Hymans, ministre des affaires étrangères, juge
inopportun de provoquer de nouvelles polémiques. En 1922, deux publicistes
catholiques, Fernand Neuray et Pierre Nothomb, qui n’avaient pas pardonné à
van der Elst sa réticence à l’égard de la politique d’expansion
territoriale à outrance qu’ils avaient préconisée depuis 1915, ainsi que le
Pourquoi Pas ?, reprennent les
accusations. Léon van der Elst fait paraître dans ce dernier hebdomadaire une
lettre de protestation. Il semble que l’ancien secrétaire général se soit défendu
avec peu d’énergie dans cette affaire. Il est vrai que celle-ci n’avait
plus en 1922 la même importance qu’en 1915. Et puis l’on peut se demander
si les accusations étaient bien fondées. On peut admettre qu’en août 1914,
le secrétaire général avait certainement d’autres préoccupations que de
s’occuper de l’évacuation de toutes les archives confidentielles, tâche
qui incombait en premier lieu à A. De Ridder, directeur des archives du département.
Il faut en outre préciser que l’évacuation devait se faire sous la
responsabilité des chefs de service des différents ministères selon les
directives de la commission de mobilisation civile, érigée en 1906 et présidée
par L. Arendt, ancien fonctionnaire des affaires étrangères ; van der
Elst n’avait jamais participé aux travaux de cette commission.
Il convient de mettre en évidence un autre aspect de son activité :
son influence auprès du Roi. Il ne faut pas oublier qu’il était devenu chef
du cabinet du ministre des affaires étrangères à un moment où le
gouvernement vernement rencontrait de sérieuses difficultés avec Léopold II
au sujet du Congo. Le roi-souverain et son entreprise africaine faisaient
l’objet de critiques, parfois violentes, de la part de certains journaux
belges, de la presse étrangère et de certains milieux politiques britanniques.
Après le départ du Baron Lambermont, admis à la retraite, van der Elst est
parmi ceux qui connaissent le mieux le problème du Congo et de la reprise de ce
territoire par
la Belgique.
Il
suit également avec le plus grand intérêt les entreprises de Léopold II en
Chine, initiatives qui ne correspondaient pas toujours aux vues du ministre des
affaires étrangères. La politique d’expansion outre-mer du roi n’avait pas
de secrets pour le secrétaire général. Il devient le conseiller de Léopold
II, probablement à partir de 1901. Quoiqu’il ne remplît jamais auprès du
souverain le rôle qu’avait joué Lambermont, il ne faut pas sous-estimer son
influence. Le roi le met au courant de l’entretien qu’il a eu le 28 janvier
1904 à Berlin avec le kaiser, qui laissait entrevoir qu’une guerre avec
la France
était inévitable et que
la Belgique
avait intérêt à se ranger aux côtés de l’Allemagne. En mars-avril 1907,
il est chargé par le conseil des ministres de se rendre auprès de Léopold II,
qui faisait de longs séjours à l’étranger, loin de Bruxelles, dans le midi
de
la France
ou à bord de son yacht, bien décidé à ne pas céder au gouvernement sur
certains points de la reprise du Congo. Le fait que van der Elst fut choisi pour
cette mission délicate, est significatif. C’est probablement sur les
instances de celui-ci que le chef de cabinet Schollaert s’adjoignit
provisoirement un jeune diplomate en poste à Bucarest, le Baron Beyens, afin de
se faire aider dans les négociations sur la reprise du Congo. Il est quasiment
certain que Léopold II proposa van der Elst comme conseiller du prince Albert,
héritier présomptif du trône. Celui-ci avait été initié par Lambermont aux
questions de politique étrangère et coloniale. A partit de 1906, le prince
s’entretient à plusieurs reprises avec van der Elst, se rend dans son bureau,
rue de
la Loi
, ou le reçoit dans sa résidence, rue de
la Science
et a rapidement une confiance absolue en lui. A la veille de son départ pour
le Congo, via Le Cap et
la Rhodésie
(à Southampton le 20 avril 1909), le prince Albert demande au secrétaire général
de veiller en quelque sorte sur la princesse Elisabeth pendant son absence et de
lui fournir tous les renseignements voulus. Lorsque le prince revient en Europe,
vers la mi-août, il convoque van der Elst en lui envoyant un télégramme
chiffré : celui-ci monte, seul avec Jules Ingenbleek (le futur secrétaire
du roi et de la reine) à bord du s/s « Bruxelles-ville », à
La Pallice
, avant-port de
La Rochelle
, afin de recueillir les premières impressions d’Albert et de recevoir ses
instructions. Durant le trajet entre le port français et Anvers, les deux
conseillers préparent le discours que le prince prononcera à l’hôtel de la
métropole. En décembre 1909, Albert succède au roi Léopold II,
congédie la cour du défunt souverain et nomme de nouveaux dignitaires, et
parmi eux, Beyens, qui devient ministre de la maison du roi. Ce choix a-t-il été
suggéré par van der Elst ? En 1912 et 1913, le roi s’entretient à
plusieurs reprises avec lui et a quelquefois recours à lui pour faire
comprendre son point de vue au chef du cabinet de Broqueville ou pour sonder les
milieux politiques catholiques. En 1912, il l’informe de ce qu’il a appris,
de différents sources confidentielles, sur les projets de guerre de
l’Allemagne et lui soumet ses projets de discours. Pendant la première guerre
mondiale, il ne convoque à
La Panne.
En
mars ou avril 1915, il le charge de rédiger un compte rendu officiel des
conseils des ministres et de la couronne du 2 août 1914, mais le secrétaire général
ne peut mener cette entreprise à bonne fin, principalement pour des motifs
d’ordre politique.
Léon van der Elst suggère probablement le choix du Comte Frédéric van
den Steen de Jehay comme chef ad interim du cabinet du roi. Celui-ci exerça
cette fonction du 16 septembre 1916 jusqu’à sa mort, à Vinkem, le 7 octobre
1918 et entretint avec van der Elst une correspondance suivie ; celle-ci était
lue par le roi Albert qui était ainsi informé de ce qui se passait au Havre.
Le souverain fait encore appel à ses services, en 1926, après la mort du
cardinal Mercier, archevêque de Malines et lui demande de plaider auprès du
Saint-Père pour obtenir la nomination de Mgr Paulin Ladeuze ; van der Elst
se rend le lendemain à Rome, mais arrive trop tard ; le pape venait de
nommer Mgr Ernest Van Roey ; à cette occasion, il fut reçu en audience
par le souverain pontife. De 1909 à 1930, Albert adressa à van der Elst une
quarantaine de lettres, télégrammes ou cartes de visite, dont un vingtaine
offrent un intérêt pour les chercheurs.
Il reste une troisième aspect de sa personnalité à souligner :
son intérêt pour l’histoire de la dynastie belge. N’avait-il pas été un
témoin privilégié et de premier rang pour en parler valablement ?
N’ayant plus d’activité professionnelle, il publie quatre articles. Le
premier,
La Préméditation
de l’Allemagne (Revue
de Paris, 1er avril 1923), fut rédigé dans l’ambiance de la
victoire des Alliées et garde toujours une valeur documentaire.
La Reine
Elisabeth.
Souvenirs de guerre parut dans
la Revue
belge (1er novembre 1924).
Deux études sur Léopold II méritent une attention particulière : Souvenirs
sur Léopold II (Revue Générale,
mars 1923) et Léopold II et
la Chine
(Revue Générale, 15 avril et 15
mai 1924). Elles sont les premières à « réhabiliter » en quelque
sorte, treize ans après sa mort, le souverain qui avait été fort critiqué et
dont la figure était passée à l’arrière-plan pendant la guerre 1914-1918,
qui fit connaître au monde entier le Roi-Chevalier. Ces deux publications ont,
sans aucun doute, suscité un nouvel intérêt pour Léopold II, que d’autres
écrivains étudieront plus tard d’une façon plus complète et plus
approfondie. Léon van der Elst avait une bonne plume. Esprit primesautier, il
était à même de formuler rapidement sur les hommes et les choses des appréciations
justes. La promptitude de la conception et l’élégance de son langage
faisaient de lui un habile négociateur. Ce haut fonctionnaire était toujours
particulièrement bien informé et était d’une discrétion à toute épreuve.
Il entretenait une correspondance avec de nombreuses personnalités belges et étrangères.
Profondément croyant, il assista au premier Pèlerinage de Pénitence à Jérusalem
en 1882 et continua depuis à soutenir cette œuvre ; le 11 juin de la même
année, il fut reçu en audience par Léon XIII. Il était un ami de
la Bonne
Presse
et un des cerveaux du parti catholique d’avant-guerre.
Emile Vandewoude – Biographie National.